lundi 18 novembre 2013

LE COCHON DE LAIT, LE PRINCE ET LE CUISINIER .

 
NATURE MORTE ET COCHON DE LAIT, WALTER VAES , 1882-1959 , MUSÉE DES BEAUX ART D'ANVERS .

 Ferdinand Grandi fut un grand cuisinier, un chef star comme on dirait aujourd'hui, cependant on sait peu de chose sur lui et il est boudé par les dictionnaires de l'époque . Il semble qu'il était aussi snob que son employeur et légèrement suffisant, ce faisant appelé Ferdinando, il écrit en 1866 un livre de cuisine destiné selon lui uniquement aux grands chefs de l’époque " LES NOUVEAUTÉS DE LA GASTRONOMIE PRINCIÈRE " ( à noter que ce livre était encore en vente à la fin du XIX siècle) dédié à son illustre, on pourrait dire mécène, le prince Anatole Demidoff qu'il affuble d'ailleurs d'un petit ( de Demidoff ) en plus de son patronyme, dans ses remerciements . Demidoff de son vrai nom Anatoli Nicolavaievich Demidov 1813 /1870, était un vrai prince Russe immensément riche et un prince de la gastronomie, ses buffets et banquets étaient courus par le tout Paris, Napoléon III en était un habitué et le nom de Demidoff fut donné à une kyrielle de préparations . Russe de naissance, il passa la presque totalité de sa vie en Italie et en France . Grandi qui fut son cuisinier attitré, était un cuisinier de la vieille époque, de l'ancien régime par les influences de Brillat-Savarin , Carême et autres apôtres de la décoration
LE FIGARO , 1858.
et du visuel avant tout, aussi ses buffets nous semblent à nous bien tarabiscotés et d'une complication inutile, mais c'était encore la mode et il faudra attendre la guerre de 1870 pour lui servir de fossoyeur .

Ferdinand Grandi après la mort de son bienfaiteur en 1870 à Paris, se tourna vers une cuisine plus modeste puisqu'il écrit en 1893 " 130 RECETTES POUR APPRÊTER LES ŒUFS " le temps n'était plus aux magnificences impériales, et aussi "CUISINE ITALIENNE OU CENT RECETTES " et "LES 700 POTAGES " , il se fit aussi éditeur "scientifique " comme il précise ( ah snobisme quand tu nous tiens ) en éditant les poèmes du célèbre cuisinier poète Achille Ozanne en 1900 .
Alors me direz-vous que vient faire dans toutes ces hautes sociétés , le petit cochon de lait . Et bien à cette époque comme aussi de temps en temps à la nôtre on préparait des
1895.
cochons de  lait pour les buffets, biens sûrs on ne se contentait pas de simple cochons rôtis , sut été trop vulgaire, mais de cochons de lait farcis soit froids soit chauds et qui demandaient un temps de préparation de plusieurs jours et un personnel pléthorique, ces cochons de lait à la Gemma et à la Washington sont les symboles de cette cuisine à la sophistication extrême et hors de prix. Les cochons de lait étaient appelés cochonnets pour un cochon castré et cochoneaux pour non castré , on privilégiait le cochonnet pour ces recettes..

JOURNAL DE LA BRESSE LOUHANAISE 1889.



Ci-dessous donc deux recettes de cochons de lait , tirées du livre , certaine explication sont assez confuse et demande de votre part un doigt d'imagination pour comprendre les recettes.


COCHON DE LAIT A LA GEMMA .
LE PRINCE DEMIDOFF 1848.
Prenez un petit cochonnet , désossez le entièrement en ayant soin de le laisser entier et farcissez -le avec la farce suivante : un tiers de veau , un tiers de porc frais et un tiers chevreuil . Ajoutez un tiers de lard et un tiers de jambon cru ( cela fait 5 tiers ?????? ) , pilez comme     d’habitude . Prenez aussi des oignons de moyenne grosseur , coupez-les en tranches et mettez-les dans un torchon . Remuez les quatre coins du torchon et touchez-les dans l'eau ( je dois dire que je ne comprends pas ce qu'il veut dire avec les oignons , je suppose qu'il veut que l'on mette les tranches d'oignons dans un torchon humide et que l'on torde le torchon pour en extraire le jus ) . Pour en faire sortir la partie acide . Mettez-les ensuite dans une casserole avec un quart de beurre , huit clous de girofle , quatre feuilles de laurier , un bon bouquet de thym , sel , poivre , une noix de muscade râpée . Faites-les cuire doucement pendant vingt minutes ; jetez le tout dans un mortier , incorporez-le bien avec la farce et finissez d’assaisonner . Ajoutez-y deux jaunes d'oeufs et passer le tout dans une étamine . Mettez ensuite le tout dans une terrine . Prenez une livre et demie de truffes coupées en bouchons ou vous ferez un trou dans le milieu et dans ce trou vous placerez un rond de langue cuite .
Farcissez 18 ortolans avec du foie gras , et faites-les cuire séparément . Un fois cuits , mettez-les sous presse pendant une  demi-heure .
Farcissez votre cochon avec la farce que vous avez mis dans la terrine et après l'avoir bien remuée . Sur chaque couche de farce , vous mettrez une partie des ortolans et quelques truffes farcies .
Ajoutez-y quelques dés de poitrine que vous aurez assaisonnés et marinés avec un peu de madère et vous continuerez de farcir ainsi votre cochon . Cela fait , enveloppez-le comme d’habitude ( de bardes de lard ) et faites en sorte que les oreilles et les jambes gardent leur forme . Faites-le cuire dans une braisière avec du bon bouillon et des légumes frais et secs . Joignez-y douze pieds de veau et faites cuire une heure un quart . Développez-le et enveloppez-le de nouveau de façon que les jambes de derrière restent couchées et que celles de devant restent droites ; les oreilles aussi doivent être droites et en avant . Vous le mettrez en presse , et quand vous le servirez  , vous couperez une partie du dos et vous le replacerez les tranches dans leur première forme . Placez-le sur un  plat où vous aurez déjà fait un croûton qui va servir de base pour le maintenir en position . Garnissez le plat avec beaucoup d'aspic brillanté dans lequel vous mettrez de distance en distance un bouquet de câpres . Vous ferez la même chose avec du blanc d'oeuf dur . Vous approcherez cette garniture aussi près que possible du cochon . Mettez , entre la bordure du plat et la garniture , de petites pyramides d'aspic que vous couperez avec le coupe-pâte cannelé. Chacune de vos pyramides devra avoir quatre gradins , vous mettrez sur le haut des pyramides à l'une une truffe bien ronde , à l'autre un jaune d’œuf , à la troisième la moitié d'un œuf dur . Vous décorez vos gradins avec de petites boules en blanc d'oeuf et en truffes que vous ferez avec avec une cuillère à légumes . Vous garnirez le cochon avec trois attelets bien fournis de truffes et crêtes de langues .
BUFFET DE F. GRANDI .

COCHON DE LAIT A LA WASHINGTON .
Prenez un cochon de lait , préparez-le comme à l'ordinaire , enlevez tout l’intérieur depuis les cuisses jusqu’aux épaules , excepté la peau . faites une farce de veau que vous passez et mettrez dans une terrine . Ayez vingt-quatre mauviettes farcies cuites à l'avance ; taillez vingt-truffes en forme de bouchons ; ajoutez  douze bouchons pareils de langue et mettez le tout avec la farce , que vous aurez assaisonnée d'un très bon goût ; farcissez-en votre cochon de lait et braisez selon l'usage .
Quand vous le servirez il doit être coupé comme une galantine froide . Vous le mettrez sous presse vingt minutes avant de le couper . Vous le dressez sur un plat avec un socle de pain proportionné . Vous le garnirez de truffes non épluchées ( à l'époque on ne brossait pas les truffes pour les nettoyer on les épluchait , il faut dire que les truffes à l'époque valaient vingt fois moins chères ) mais lavées et de petites timbales faites avec une sauce allemande bien réduite , dans laquelle vous aurez mis une printanière bien assaisonnée et de gros champignons tournés . Vous ferez une sauce espagnole avec une pointe de poivre de Cayenne. Servez dans une casserole d'argent une soubise que vous garnirez d'oignons glacés .
AUX AMBASSADEURS ; LES GENS CHIC, 1893 , HENRI DE TOULOUSE -LAUTREC .








Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire