LA PREMIÈRE FEMME APPRENTIE EN BOULANGERIE A BERLIN , 1914 , MEDIATHEQUE DE CHARENTON LE PONT |
Je ne vais pas revenir sur la trouvaille ( contestée ) du boulanger viennois Peter Weidler qui pour faire bisquer Mahomet II et ses troupes assiégeants Vienne , inventa non pas la recette de base du croissant qui existait déjà ( assez éloignée de l'actuelle ), mais sa forme , non plus droite , mais en forme de croissant de lune , étendard du grand Mahomet II.
Appelé , au commencement lune ou cornet ou demi-lune, sa notoriété se répandit lentement en Europe. Le croissant ne vint vraiment en France que à partir des années 1840 et cela grâce à une pâtisserie Viennoise qui s'ouvrit à Paris , mais son rayonnement en France fut long, et pour explication il faut rappeler que les matières premières pour la fabrication des croissants n'étaient pas aussi couramment trouvable qu' à notre époque , le beurre rarement de bonne qualité , vite rance et onéreux , la farine de blé souvent introuvable et sujette à de nombreuse fraudes , quand à la levure on ne mettra au point une levure stable et de bonne qualité que vers les années 1850 .
Rappelons que le sucre quand à lui coûtait très chère ( au début du XIX siècle un kilo de sucre de canne coûtait 20 francs , soit quatre jours de salaire pour un bon boulanger ) avant l'invention du sucre de betterave , pour mémoire , Madame de Maintenon fabriquait ses confitures avec 125 grammes de sucre par kilo de fruits .
Ce n'est donc que à partir du troisième quart de ce siècle, que le croissant grignota la brioche jusque-là la reine incontesté, pour rompre le jeune du matin et cela bien-sur uniquement pour les nantis , la grande masse des français se contentant le matin d'une soupe de pain .
Si sa formule a peu changé depuis cette période , c'est surtout la réglementation officielle ( Loi de 1901 , loi qui est depuis peu respecté) qui imposât un croissant au beurre en forme de demi-lune et un croissant sans beurre mais avec matière grasse une forme droite , avant cela les mauvais croissants fleurissaient dans les boulangeries hexagonales .
Pour commencer je vous rappelle ci-dessous la formule originale du croissant viennois au XIXè , suivie du croissant à la Condé purement français ( pour l’anecdote , à la mort du grand Condé , un des plus grands gastronomes de son temps , la personne chargée de mettre de l'ordre dans ces affaires financières s’aperçut qu'il laissait l'équivalent de plus deux cents mille Euros de dette chez ses fournisseurs de produits de bouche , comme on disait à l'époque ), à la mode au XVIIè et au XIXè , mais qui est depuis tombé en désuétude et enfin un croissant provençale très originale et fantaisiste .
LIVRAISON DE FARINE A REIMS , PAUL CASTELNAU 1880-1949 , MEDIATHEQUE DE CHARENTON LE PONT |
LE CROISSANT VIENNOIS ORIGINALE.
Les proportions : Farine de gruau de Hongrie......... 1 kilo , Beurre ..... 300 grammes........ , Levure ......40 grammes, Lait.........1 litre .
Commencez par le levain , à cet effet : Disposez en fontaine 125 grammes de gruau , placez au milieu la levure , que vous délayez avec un peu de lait tiède , puis pétrissez le tout que vous travaillez jusqu'à ce que la pâte , qui doit être plutôt molle que ferme , se détache bien des doigts .
Mettez la ensuite dans une terrine couverte , que vous placez dans un endroit tiède , pour y laisser lever la pâte du levain pendant une demi-heure .
Au bout de ce temps , lorsque le levain a au moins doublé de volume , délayez-le avec le restant du litre de lait , dans lequel vous avez fait dissoudre le sel .
Incorporez alors le restant de la farine au levain , ainsi délayé , et pétrissez bien le tout pour en former une pâte un peu se détachant parfaitement des doigts .
Roulez cette pâte en une boule que vous farinez légèrement et laissez reposer une dizaine de minutes .
Au bout de ce temps , aplatissez cette pâte comme la détrempe pour feuilletage , mais assez mince ; puis par dessus étalez y le beurre en couche bien égale , tout en ayant soin de ne pas en recouvrir les bord .
Ployez la pâte , de façon que le beurre s'y trouve bien enfermé à l'intérieur .
Reployez ensuite la pâte en boule que vous placez sur un linge et au frais pour y laisser la pâte pendant 2 heures au moins . Généralement , on prépare ainsi la pâte le soir pour la cuire le lendemain matin .
Pour dresser les croissants , on commence par reployer sur elle même la pâte , pour en reformer une boule que l'on laisse reposer pendant un quart d'heure ; puis allongez cette pâte en boudin que vous découpez en morceaux , à raison de 40 par kilo de pâte pour ceux vendus 5 centimes , et 20 pour vendus 10 centimes ( prix d'un croissant en 1897 ) .
Après avoir roulé en boules ces morceaux , laissez-les reposer une dizaine de minutes , puis , à l'aide d'un rouleau , vous abaissez pour les rendre ovales .
Reployez alors sur le milieu l'abaisse de pâte et roulez la comme une cigarette , à laquelle vous donnez la forme d'un croissant ; placez-les ensuite à mesure , sur une planche recouvert d'un linge légèrement saupoudré de farine . Laissez ainsi lever les croissants pendant une bonne heure .
Pour les cuire , placez les croissant sur une plaque , dorez-en dessus à l’œuf battu et mettez dans un four de bonne chaleur ( 180 degrés ) .
J.Fiderman , 1897 .
CONDÉ EN CROISSANT A L’ANIS .
Proportions : Sucre en poudre ......375 grammes , Graines d'anis........200 grammes , Blanc d'oeufs ......nombre 3 , orangeât haché ....... 3.
Piler l'anis avec l’orangeât en mouillant progressivement avec les blancs d'oeufs ; ajouter par petites doses le sucre et triturer jusqu'à ce que l'on ait obtenu une pâte homogène .
Prenez vos croissants préparés comme à l’habitude avant cuisson, entrouvrez les délicatement avec une fine lame et farcissez les d'une fine couche de préparation à l'anis , refermez , placez sur une plaque , dorez au jaunes d'oeufs , et cuire au four comme de coutume .
BOULANGERIE PARISIENNE , XIXè, FOND GAUGET-WIDMER |
CROISSANT DE PROVENCE .
Proportions : Amandes douces mondées.....500 grammes , Sucre ......500 grammes , Marmelade d'abricots ......125 grammes , Blancs d’œufs....... 7 nombre .
Après avoir mis dans un mortier 500 grammes d'amandes mondées , on les piles , en les mouillant peu à peu avec sept blancs d’œufs , jusqu'à ce qu'elles forment une pâte très fine .
Pour que cette opération soit bien faite , il ne faut ajouter les blancs d'oeufs aux amandes , en les pilant , que deux par deux , et seulement lorsqu'ils se trouvent absorber par la pâte , qui doit toujours conserver une teinte blanchâtre ; et ne doit pas prendre un aspect jaunâtre .
Les amandes pilées , on met dans un mortier 125 grammes de marmelade d'abricots , et on mélange bien le tout ensemble , à l'aide du pilon .
On passe maintenant à la cuisson du sucre .
On met dans un poêlon d'office en cuivre non étamé , les 500 grammes de sucre en pain , cassé en morceaux , et on les arrose avec un quart de litre d'eau ; puis on fait cuire le sucre au cassé , qu'on verse alors peu à peu dans le mortier ou se trouvent les amandes pilées , auxquelles on l'incorpore , en mélangeant vivement le tout à l'aide du pilon .
Lorsque le mélange est terminé , on ramasse la pâte que l'on place sur un marbre légèrement saupoudrée de sucre en poudre , pour y dresser les croissants .
Pour dresser ces croissants on commence par manier un peu de pâte avec les mains , puis , on la roule en un boudin que l'on découpe ensuite en morceaux d'un pouce d'épaisseur .
Maintenant , on met dans une assiette un blanc d’œuf que l'on bat à l'aide d'une fourchette , seulement pour le briser ; puis ,on incorpore une cuillerée à café de sucre glace .
D'autre part , on met dans un plat les amandes effilées . Tous ces préparatifs terminés , on prend un morceau de pâte et on commence par la rouler en forme de boule que l'on allonge ensuite en forme de navette que l'on trempe dans le blanc d’œuf battu , d’où on la retire à l'aide d'une fourchette pour la poser dans un plat ou se trouvent les amandes effilées , au milieu desquelles la on roule , jusqu'à ce quelle soit entièrement recouverte .
Avec les doigts , on donne à cette navette la forme d'un croissant et l'on pose ainsi sur une plaque en tôle .
Il ne reste plus qu'à faire cuire dans un four assez chaud ( 180 degrés ) les croissants ainsi dressés ) , et dès que la couche d'amandes qui recouvre le croissant a pris une couleur légère teinte dorée , on retire la plaque du four et ; à l'aide d'un pinceau on badigeonne d'une légère gomme fondue .
P. Garnier
Le journal du pâtissier et boulanger , 1899 .
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